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Serge Jaeggy
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2 avril 2013

Menace sur les Communes ! Où est la proximité ?

La commune est la brique de base de notre démocratie et son acte de naissance politique remonte à 1789, tout comme le département.

Les Français y sont très attachés, comme symbole de proximité.

Lors d’une récente réunion publique pour le « oui », Philippe Richert et l’un de ses vice-présidents, René Danesi, ont plaidé pour un rôle beaucoup plus grand des communautés de communes et d’agglomération, notamment par le biais des "conseils de territoire de vie", dont il est question dans le projet annexé à la consultation du 7 avril. Avec pour corollaire un net rétrécissement des compétences des communes, vidées de leur substance. 

Lors de la préparation du projet de nouvelle Collectivité (qui déborde le principe de la fusion à compétences égales, tel que prévu par la loi de 2010, puisque les promoteurs du projet ont souhaité y adjoindre une annexe demandant bien plus tout en restant dans le flou), les grandes agglomérations ont été largement consultées.

Cela n’a pas du tout été le cas des petites communes. C’est regrettable, mais c’est surtout un symptôme.

Au moment où de nombreuses écoles rurales ferment des classes, quand ce n’est pas leur porte, au moment où les services publics s’éloignent toujours plus de leurs usagers (tribunaux, poste…), voilà qu’on nous promet qu’avec un conseil d'Alsace dont le siège effectif sera à Strasbourg, il y aura « plus de proximité ». On a dû mal à y croire.

Lors de l’une des réunions publiques auxquelles j'ai assisté dans le Sundgau, Philippe Richert a évoqué cette spécificité française : « aujourd'hui, on a autant de structures politiques que dans toute l'Europe réunie ». Le président du conseil régional fait allusion notamment aux 36 600 communes françaises, aussi nombreuses que la totalité des communes des 26 autres membres de l’Union européenne.

Il faut dire que ce qu’on appelle "commune" chez nos voisins ressemble à de grosses communautés de communes et que l’échelon politique villageois n’y a souvent pas de réelle existence : « une commune française compte en moyenne 1 800 habitants contre 5 500 pour celles de l’Union européenne » dit un très récent rapport de l'OCDE qui incite à la suppression des départements en même temps que celle des communes, et « approuve la baisse prévue des dotations aux communes » dans le but précisément de les asphyxier. Mais de quoi se mêle-t-on ?

Une démocratie de proximité, non pas un "coût" !

« C'est une chance, poursuit Philippe Richert à propos du maillage communal français, c'est plus de démocratie, mais c'est aussi un coût ». La France est certes le seul pays européen à avoir autant d’élus : plus de 500 000 par mandature et, sur plusieurs générations, des millions de citoyens qui se sont frottés au suffrage universel.

Si l'on y ajoute encore conjoints et proches, cela fait un nombre incalculable de citoyens qui côtoient ou ont côtoyé la réalité politique (relation avec les administrations, eau potable, assainissement, ordures ménagères, voirie, bâtiments publics, forêt, budget, fiscalité, investissements, cérémonies officielles...).

C’est un "plus" démocratique, c’est vrai. Mais, non, M. Richert, ce n'est pas "un coût". Car ces élus sont très majoritairement des bénévoles et souvent très impliqués. C'est aussi une proximité irremplaçable entre élus et non-élus, qui manque à bien d’autres échelons. Cette liberté d'action n'existe quasiment pas dans d'autres pays. Ce sont des trésors politiques et cela compte parmi les raisons de la vitalité de notre démocratie. Il serait insensé de dilapider cet héritage. Et pourtant…

"Des élus professionnels" : c'est cela la proximité ?

Philippe Richert a ainsi annoncé de ses vœux une « évolution du statut de l’élu ». Il souhaite en effet « que les élus ne soient pas seulement ceux qui se retrouvent le soir en réunion de com.com »...

Rappelons tout de même à qui veut précisément faire des économies que ce sont justement ces "petites réunions du soir" qui ne coûtent pas bien cher à la collectivité. Le modèle auquel il tend, il est une nouvelle fois outre-Rhin : nous devrions avoir des « élus professionnels, comme en Allemagne », formés et payés en conséquence. En effet, « quand on perd un mandat, se plaint le président du conseil général, on est parfois à la rue ». Pas sûr que ce soit la première préoccupation des électeurs.

Vanter la proximité dans toutes les réunions publiques, c'est beau, mais cela pourrait bien n'être que du vent (comme les promesses de Maastricht en 1991). Car n'est-il pas plus utile que nos élus aient un ancrage dans la vie active, en y ayant travaillé, plutôt que de sortir d'écoles d'administration ou de "sciences" politiques, pour ne connaître ensuite que le salariat d’élus professionnels ? C'est là que les élus de proximité que sont maires et conseillers municipaux sont bien précieux. Mais on ambitionne visiblement de les transformer en animateurs socio-culturels (une belle profession au demeurant)...

Pour les communes : "l'animation et la vie sociale" !

« Il y aura un conseil de territoire de vie du Sundgau, sur la base des communautés de communes, préalablement élargies et renforcées », affirmait peu avant René Danési, vice-président du conseil régional. Quelle sera alors la place des communes dans cette nouvelle organisation ? Réponse engouée de Philippe Richert : « Rassurez-vous, les communes ne disparaîtront pas, c’est un fantasme ! »

Mais quelles seront leurs compétences ? Réponse, du tac au tac, de l’ancien ministre : « L'animation et la vie sociale... Pour le reste, cela devrait être transféré aux communautés de communes et d'agglomération ». Bref, la commune ne disparaîtra pas. Ou en tout cas pas tout de suite. En attendant, il en restera la coquille. Presque vide.

Tout comme le département, dont Philippe Richert repète aussi en réunion publique qu'« il ne disparaîtra pas ».

Mais que dit la notice dite "d'information", distribuée aux électeurs d'ici le 7 avril, sur la question communale ? « Dans un souci d'efficacité et d'application du principe de subsidiarité, la Collectivité Territoriale d'Alsace pourrait, dans le cadre du dialogue avec les communes et les établissements de coopération intercommunale, leur confier la mise en oeuvre de certaines de ses compétences ». Il faut surtout y entendre le conditionnel. Cela se "pourrait". Ou pas. Comme tout le reste.

C'est une bulle que nos élus sont en train de se construire. Ne les laissons pas s'y installer.

Le 7 avril, ne tombons pas dans le piège de l'abstention. Votons non.

Mathieu Lavarenne

Président du Cercle Républicain 68 Edouard Boeglin

Conseiller municipal indépendant à Mooslargue

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