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Serge Jaeggy
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1 avril 2013

Lettre d'une religieuse Alsacienne au Vénézuéla qui parle de Hugo Chavez

Lettre de Soeur Bernadita une religieuse alsacienne qui vit dans le bidonville de Los Teques au Vénézuela depuis 23 ans. Elle fait partie de l'institut des "petites soeurs de l'Evangile".

Los Teques, (Venezuela), 9 Mars 2013

Hugo Chávez est parti vers l’autre côté de la vie…

Plongée dans un grand silence, pour le deuil de tout le voisinage, assimilant peu à peu la densité, l’impact, la douleur et l’action de grâces, je tâche de libérer la parole et mettre un peu d’ordre dans mes pensées, mon émotion, et de répondre aux nombreux messages reçus d’au-delà de nos frontières et de notre pays, d’amis/amies proches.

Nous vivons des moments transcendantaux, historiques. Il suffit de voir la multitude de personnes faisant la queue, depuis trois jours, pour dire un adieu, un remerciement à notre cher Président, le Commandant Hugo Chávez. Deux millions de personnes en deux jours, défilèrent devant les restes mortels du « commandant ».

Il suffit de voir et d’écouter les nombreux chefs d’Etat et de Gouvernement (une cinquantaine), les délégations de Mouvements Populaires, diverses personnalités du monde entier, pour affirmer que la disparition physique de notre Président émeut le Venezuela, l’Amérique Latine et les Caraïbes, et le monde entier, sobre le SUD.

Au-delà de sa mort, Chávez rassemble, provoque des explosions d’amour, de remerciements, de rassemblements pacifiques, de « perte » de temps et de forces, pour supporter des queues kilométriques, dans la bonne humeur et le partage.

Quelle est la raison de tant de débordement de sentiments ?

Il fallut que Chávez soit mort pour que les médias, internationales, commerciales, relèvent des faits si marquants, si inédits ?

Mais ce noble peuple, les gens « d’en bas », ceux et celles qui étaient rendus « invisibles » jusqu’à l’avènement de Chávez au pouvoir, toutes les personnes qui ont lutté pour un Venezuela de tous et de toutes, pour une démocratie réelle, celle du peuple qui en est devenu le protagoniste, les survivants des disparitions et des tortures de la dite démocratie que certains cherchent à nous imposer de nouveau, toutes ces personnes savaient et comprenaient depuis bien longtemps, depuis la première élection de Chávez comme Président de la République, et beaucoup, depuis bien avant, depuis la fameuse rébellion du 4 février 1992, avec son historique « pour le moment » de l’apparent échec de cette action libertaire. Déjà nous y découvrions la droiture, la rectitude de ce Chávez assumant personnellement la rébellion et acceptant être prisonnier.

Si la perte physique de notre Président nous fait souffrir et marque un fait historique dans la construction d’un pays différent, d’Amérique Latine et des Caraïbes, différente, d’un « autre monde possible », il n’y a pas de rupture, ni de changement de direction pour le Venezuela Bolivarien.

Nous avons un gouvernement ferme, nous avons des institutions de l’Etat fonctionnant bien, et nous avons des leaders fidèles à la pensée et à tout ce que Chávez a voulu, pour arriver au but, qui est : « obtenir le plus grand bonheur possible, surtout pour les plus pauvres ». Dans leurs mains, la Révolution Bolivarienne, humaniste, d’inspiration chrétienne, selon l’humble et pauvre charpentier de Nazareth, continuera.

Le discours de Nicolás Maduro d’hier, contient toutes les lignes d’action et lui-même a forgé ses idéaux aux côtés de Chávez. Dans son discours « d’adieux » du Président Chávez, du 8 décembre dernier, à la veille de partir pour affronter une nouvelle intervention chirurgicale à Cuba, déjà nous pouvions percevoir le danger que Chávez assumait consciemment. Ses mots résonnent encore dans nos têtes. « Personne n’est indispensable »… « Aujourd’hui, nous avons une patrie, aujourd’hui nous avons (nous sommes) un peuple, que personne ne s’y trompe ! »… « Unité, unité, unité »… Ensuite, il nous expliqua les articles de notre Constitution, qui prévoient les cas « absence temporelle et d’absence totale permanente » (sa mort)… comme s’il s’agissait d’un autre que lui :

« Aujourd’hui, nous avons une patrie, aujourd’hui nous avons (nous sommes) un peuple ». Ces mots peuvent sonner bizarres pour ceux et celles qui vivent sous d’autres latitudes. Ici, ceci est une expérience personnelle, dans un pays qui a été dominé, objet de saccage, matériellement et culturellement durant des siècles. Etre un peuple, c’est être une personne, avoir une identité propre, compter pour quelqu’un, avoir une carte d’identité et avoir accès à tous les Droits de l’Homme (et de la Femme) essentiels : LA VIE, la santé, l’éducation, le travail, la culture, le droit d’être soi-même, et non un calque d’un autre pays ou d’une autre culture, qui nous fasse renier la nôtre.

J’ai été très impressionnée d’écouter les grandes Médias commerciales parler maintenant d’un autre Chávez (enfin du Chávez que nous avons connu toujours !!!). Bon, il me faut relativiser cette constatation, car il y en a qui continuent à utiliser le langage insultant, mensonger, qui a été le leur, afin de salir et calomnier le Président Chávez. Mais aujourd’hui, ils lui reconnaissent certaines qualités et voient dans le peuple vénézuélien et dans notre pays, et au-delà de nos frontières, l’œuvre immense réalisée par cet homme hors du commun.

Je crois que pour connaître un peu la stature de Chávez, il faut écouter un peu ceux et celles qui sont venus ces jours-ci pour vivre le deuil avec notre pays : chefs d’Etat, personnalités diverses, les gens de la rue : chacun/chacune nomma quelque chose dont Chávez a été l’inspirateur, l’artisan, contre tout et tous ceux qui voulurent empêcher la liberté et l’indépendance de nos peuples. Nommer Chávez, c’est nommer l’OPEP raffermi, le Mercosur, l’Unasur, la Banque du Sud, la Radio du Sud, TELESUR, la monnaie Sucre pour notre continent, les Missions à l’intérieur et hors du pays, la restitution du droit d’exister de Cuba, Petrocaribe, la CELAC, la recherche de la paix en Colombie, etc.

Pour moi, personnellement, Chávez a été un homme de Dieu, un être humain dont le cœur profondément samaritain, débordait de sa corporalité. Il a vécu à fond l’Evangile de Jésus de Nazareth, celui des Béatitudes. Il a fait de l’Evangile selon Mathieu 25 (jugement final) son programme politique de gouvernement : « J’ai eu faim et tu m’as donné à manger, j’ai eu soif et tu m’as donné à boire… » Il s’est réclamé du Dieu de Jésus, le Libérateur, plein de compassion, dont les pauvres sont les préférés. Son emprisonnement dans la prison de Yare fut un long temps de retraite, durant lequel il a approfondi la Parole de Dieu, ainsi que les écrits des Libérateurs, surtout de Simón Bolívar.

Avec Chávez il y a eu un resurgissement de la spiritualité au sein du peuple. N’oublions pas les paroles de Chávez, l’an passé, quand il revenait de ses 2 premières opérations, devant le Christ de la Grita (lieu de pélerinage) : « Je m’offre de bon cœur au Christ Rédempteur, pour mon peuple ». Et il a effectivement vécu une longue passion durant toutes ces dernières semaines de lutte contre la maladie terrible, un vrai combat contre la mort. Maintenant, il revient aux autorités compétentes de faire la lumière sur qui et comment a été inoculé ce mal.

Il était un homme du peuple. Il n’oublia jamais ses racines : pauvre, métisse, né au fin fond de la campagne de Barinas. Sa sensibilité l’a rendu proche des gens pauvres, de ceux et celles qui étaient dans le besoin. Il avait le charisme de rendre la valeur en soi au pauvre, à l’indigène, au vieillard, aux enfants et à la femme. Chaque personne était unique pour lui, avait un nom et une histoire personnelle. Grâce à son attitude d’être fier d’être « zambo », c’est-à-dire, mélange de noir et d’indien, d’origine pauvre, la majorité des Vénézuéliens, métisse, noire ou indienne, se sentait reconnue, valorisée pour ce qu’elle est.

C’était un homme droit, entier, vrai, profondément humble, malgré les apparences… et les caricatures dont il a été l’objet. Il n’a jamais trompé les gens. Il accomplissait sa parole. Il savait demander pardon et reconnaître ses erreurs. Il savait reconnaître les valeurs chez les autres, proches collaborateurs ou autres chefs d’Etat. Il était un « livre ouvert », parfois trop spontané, car il exprimait librement ses sentiments. Il avait un fort sens de l’humour, par lequel on percevait ses racines populaires.

Chávez possédait une culture monumentale, et, avec l’intelligence qui le caractérisait, ainsi que sa mémoire hors de commun, il était notre maître et avec des mots simples et compréhensibles, il donnait des classes magistrales d’histoire et d’autres connaissances. Il forma les gens, ainsi que son équipe de gouvernement. Motivé par son grand cœur, il savait gouverner avec beaucoup de sagesse et de compétence, formé dans sa chère Académie militaire. Il lisait beaucoup et était ouvert à tout ce qui fait notre monde actuel, si complexe. Il forma et agglutina les gens et à présent le peuple n’est plus ignorant, ni manipulable.

Chávez était un vrai chant à la vie. Il aimait la vie et la célébrait. Il communiquait sa joie à son peuple, à travers les chants et les plaisanteries, ou l’admiration de tous les coins du Vénézuéla qu’il connaissait pour y avoir été en tant que militaire ou chef d’Etat. C’était un amoureux de la nature et clamait pour la « Mère-Terre », notre planète que l’on est entrain de détruire. Il était débordant de vie et le transmettait aux autres. Sa résistance était presque sans limites, il travaillait beaucoup… et exigeait aussi beaucoup à ses collaborateurs. Il dormait peu. Tout était urgent, les besoins des gens le pressaient. Il prenait sur lui toute l’angoisse et les douleurs de ceux et celles qui souffraient. Il voulait, comme Jésus que « tous aient la vie, et la vie en abondance ».

Il fut un grand homme d’Etat, mais surtout une personne véritablement et simplement humaine. Il faut dire un mot de sa manière de gouverner et le meilleur que l’on peut constater est inscrit dans le Plan de gouvernement qu’il proposa en 2012, et que le peuple tout entier a pu discuter, modifier, compléter. Les 5 lignes de ce Plan expriment, avec la nouvelle Constitution promulguée après referendum, en 1999, tout ce que Chávez a mis en route dans notre pays. Comme preuve que Chávez n’en est pas resté sur le plan de promesses et qu’il a accompli tout ce qu’il avait promis, nous avons la grande quantité d’œuvres et de bénéfices octroyés à son peuple, pour tous, en particulier pour ceux et celles qui sont le plus dans le besoin.

Chávez, un bon pasteur qui donna sa vie pour ses brebis. Après le 14 avril 2002, lors du retour de Chávez au pouvoir, grâce à l’Armée fidèle et aux multitudes clamant dans les rues, un ami m’envoyait du Salvador ces paroles de Monseigneur Romero : « Avec ce peuple, il n’est pas difficile d’être bon pasteur »… découvrant comment le peuple venezuelien sortit dans la rue en foule, pour restituer Hugo Chávez à la Présidence, et l’arracher des griffes de l’Empire et de ses vassaux. Oui, Chávez a donné sa vie pour son peuple et Chávez était comme transfiguré de joie, d’amour, de tendresse, face à son peuple qui l’accompagnait. Il faudra bien qu’un jour un théologien ou une théologienne recueille cette forme d’offrande totale de soi, en tant que Président d’un pays, cette manière d’être homme politique, avec une mystique de service et de sacrifice, de vrai martyre, donnant sa vie « de bon cœur », afin que le peuple ait plus de vie. Quel témoin fidèle de su cher Maître, Jésus !

A présent il nous faut nous approprier de l’héritage du Commandant Chávez. La meilleure manière d’honorer sa mémoire est d’assumer, chacun selon sa position, ce qu’il nous revient. Les tâches sont énormes et sont à la mesure des défis de notre monde actuel, si convulsionné. Mais celui « qui a assumé le sort aux côtés des pauvres de la terre », comme Jésus, espère que nous puisions de sa passion pour un monde meilleur, un monde de paix, d’égalité, d’amour, de respect et de prédilection pour les plus pauvres.

Avec Nicolás Maduro aux commandes de la barque, il n’y a pas lieu de craindre et de nous perdre. Il a appris aux côtés de Chávez, a supporté l’impétuosité de son grand ami et saura bien nous mener sur la route de la vie. Que le Dieu de la VIE le bénisse et l’illumine toujours.

Merci Chávez, pour tant d’amour transformé en œuvres !

Hugo Chávez présent !!!

 

 

 

 

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